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Section de langues slaves, option linguistique // Кафедра славянских языков, лингвистическое направление


Univ. de Lausanne, Faculté des Lettres

Section de langues slaves, Option linguistique

Année 2006-2007,

Prof. Patrick SERIOT

Séminaire de licence / Bachelor-3

(automne 2007, le mardi de 15 h à 17 h, salle 5093)

Языковое строительство в СССР, 1917-1933. Теории и действительность. / L’édification linguistique en URSS : l’imaginaire et le choc du réel

Prof. Patrick Sériot, avec la participation d’Elena Simonato, Ekaterina Velmezova, et Tatjana Zarubina

20 novembre 2007 : Один или два белорусского языка?

 

Compte-rendu : Adrien Pingoud

Aujourd'hui en Biélorussie il existe deux langues officielles: le russe et le biélorusse. La constitution garantit aux Biélorusses l'usage des deux langues. Mais en réalité la majorité de la population parle soit russe, soit la «trasjanka», qui est un mélange de russe et de biélorusse. Il n'existe d'ailleurs pas d'université biélorussophone. La langue biélorusse elle-même possède deux variantes : la tarashkévitsa et la narkomovka.

Aujourd'hui pour beaucoup de gens, le russe reste la langue de base pour communiquer. En effet, peu de gens parlent le biélorusse, il est surtout la langue de l'élite, du prestige et des intellectuels.

Le bilinguisme en Biélorussie est un phénomène de masse. La proche parenté du russe et du biélorusse les rendent compréhensibles pour la majorité de la population et de nombreuses personnes utilisent indifféremment les deux langues. Mais le manque de netteté entre les différentes aires de répartition de ces deux langues ne permet pas de considérer le bilinguisme biélorusse comme une diglossie. Cependant, on remarque une différence de répartitions des langues entre les grandes villes, les villes de tailles moyennes et les campagnes. Les grandes villes sont en effet essentiellement russophones. En outre, il y a de nombreuses interférence entre les deux langues. Une grande partie de la population parle ainsi la trasjanka.

La trasjanka est une langue mixte à base biélorusse, mais avec un lexique principalement russe, une phonétique proprement biélorusse et une grammaire mixte. La trasjanka est surtout utilisé par les habitants des petites villes et de la campagne. Cette langue ne possède pas de système défini et fixe, mais varie suivant les interlocuteurs. L'usage de la trasjanka est parfois aussi lié au fait que certaines personnes ne possèdent des bases suffisantes ni en russe et ni en biélorusse.

La tarashkevitsa est la langue décrite dans le livre Grammaire scolaire biélorusse, écrit en 1918 par Branislav Taraškevič. Il s'agit de la première tentative de normalisation d'une langue écrite biélorusse. Mais de nombreux problèmes subsistaient, particulièrement au niveau de l'alphabet et de l'orthographe. C'est pourquoi en 1926 s'est tenue à Minsk une conférence dont le but était de réformer l'orthographe biélorusse. Des linguistes de toute la Biélorussie furent invités (y compris de la «Biélorussie occidentale», alors sous administration polonaise). La conférence fut un succès et l'académie des sciences biélorusse chargea une commission d'élaborer de nouvelles règles orthographiques . Cependant, ce mouvement prit fin, remplacé par la politique de russification de l'URSS . Les tenants de la « national-démocratie » furent dénoncés comme contre-révolutionnaires et envoyés en prison. Plusieurs linguistes communistes accusèrent les national-démocrates (parmi lesquels de nombreux participants de la conférence de 1926) d'être antirévolutionnaires. Les travaux de la commission purent cependant continuer et les résultats furent publiés en 1933. Or le conseil des commissaires du peuple proposa la même année une contre-réforme qui entra immédiatement en vigueur. Le biélorusse devint une langue académique, mais « soviétisée ». En effet, cette contre-réforme avait pour but de réduire les différences entre le russe et le biélorusse et de purifier le biélorusse des innovations «contre-révolutionnaires» introduites par les national-démocrates. Un autre but de cette contre-réforme consistait à simplifier l'orthographe biélorusse afin de rendre le biélorusse «plus accessible au peuple». C'est ainsi que la narkomovka (de l'abréviation narkom, narodnij komissar), la deuxième variante du biélorusse, vit le jour.

A la fin des année 80, la libéralisation du régime permit le retour en grâce de la taraškevica et l'abandon des pratiques soviétiques. Aujourd'hui la taraškevica est surtout utilisée par les élites culturelles de la Biélorussie, alors que la narkomovka tend à disparaître. Ainsi, même si le biélorusse a le même statut que le russe, un seul un nombre restreint de la population le parle. Le russe et la trasjanka restent donc les idiomes les plus parlées en Biélorussie.

 

 

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