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Centre de recherches en histoire et épistémologie comparée de la linguistique d'Europe centrale et orientale (CRECLECO) / Université de Lausanne // Научно-исследовательский центр по истории и сравнительной эпистемологии языкознания центральной и восточной Европы


-- Nouvelle rubrique : nos étudiants en stage en Russie et Europe orientale nous écrivent et nous font part de leurs aventures et de leurs états d'âme.


— 2007-2008 Stéphanie DUBOSSON


5. La police

 

Des gens en uniforme, on en voit à tout instant à St Pétersbourg. Des casquettes vertes coiffant de fiers Russes, des camouflages habillant les militaires, parfois de jeunes matelots, la « militsia » (police) qui peut vous arrêter à tout instant pour vous demander aimablement vos documents, etc. …

C’était pourtant une journée qui avait bien commencé !! 10h, rendez-vous à l’arrêt de bus en face de l’obshizhitie. Le samedi est pour mes amies italiennes et moi le jour des excursions. Comme on l’a dit une fois, la semaine nous sommes des étudiantes, le vendredi est le soir des spaghettis, le dimanche celui des blinis et le samedi, nous sommes des touristes !! Ah, vous savez, des vrais, mais qui communiquent entre elles en russe. Un peu étrange, un peu surnaturel comme situation, de parler russe entre une suissesse et deux italiennes, mais on s’y fait. Munies de notre guide de voyage et armées de nos appareils photos, nous avions décidé aujourd'hui que, malgré les prévisions météo qui s’annonçaient terribles, nous irions nous promener et visiter quelques-uns des monuments que recèlent, au plus profond d’elle-même, cette ville slave. Bus n°7, destination Ermitage. On y est arrivé sans problème, pas d’accident de circulation (pouah !! quelle chance, quand on voit comment conduisent les indigènes…). Ensuite, le moment le plus délicat : déplacement à pied pour atteindre tous les points jalonnant notre programme du jour : place des décembristes, la magnifique et imposante cathédrale Saint-Isaac, divers monuments à la gloire des tsars, d’imposantes bâtisses de richissimes, bref, admirer les beaux monuments et belles places des lieux, tout en profitant de l’agréable douceur de la journée pour se promener dans des parcs. Quelques gouttes de pluie rythmaient nos visites et le vent, certes fort, nous poussait à la découverte des lieux magiques de la ville. Que de poésie !!

Nous nous étions arrêtés au Champ de Mars pour profiter des bancs afin de nous arrêter dîner (c’était environ 14h30, mais comme je l’ai déjà dites plusieurs fois, le temps ici ne semble pas être identique à celui que l’on connaît à l’Ouest). La vie du monument de la Liberté (anciennement monument aux morts de la révolution) est rythmée par les mariés qui viennent se photographier. Cela n’est guère étrange à St Pétersbourg, presque tous les monuments, statues, parcs voient défilés des hommes endimanchés et de jeunes dames en robe blanche. Certains lieux ont plus d’adeptes que d’autres, à l’image de Peterhof. Mais cela est compréhensible, vu que le cadre est simplement somptueux !!

En poursuivant notre balade, nous nous sommes dirigées vers le parc voisin : le parc d’été, tout en lisant nos guides à proprement de cette étendue de verdures. Toutes joyeuses de notre journée bien entamée et agréable (même si le soleil n’était pas de la partie), nous sommes entrés dans ce parc gratuit où, à l’entrée, il y avait des écriteaux sur les lieux, comme à l’habitude, dira-t-on. Nous n’y avons guère prêté attention et avons poursuivi notre route, tout en l’interrompant parfois pour nous prendre en photos. Nous ne sommes certes pas imbues de nous-même mais cela constituera, à terme, de beaux souvenirs !!

Les arbres revêtent leur parure dorée, tantôt emportée par le vent qui joue avec les feuilles d’automne. Une journée agréable de septembre, en somme. A un croisement d’allées, s’étend une sorte de petit rond, réalisé par les haies délimitant les chemins, ornementés par quatre statues à la romaine. Un enfant, peu emprunt à la conservation de ses monuments, leur lance tantôt des coups de pied, bientôt réprimandés par l’un des agents de la militsia qui surveille les lieux. Un événement qui nous surprend peu. Peu après, l’une de mes amies italiennes, aimant être prise en photo pour ses souvenirs, s’approche de l’une des statues (veritas) et touche de la main la statue pour la photographie qu’elle m’a demandé de réaliser. Mauvaise idée !! Alors que notre autre amie italienne nous rejoint, la militsia s’empresse alors de nous rejoindre elle aussi, pas pour une visite de courtoisie… L’agente arrivée à notre hauteur s’empresse de nous demander nos documents. Malheureusement que je n’ai pas pu voir son visage au moment où je lui ai montré mon reluisant passeport blanc à croix rouge, vu que j’étais occupée à regarder mes amies sortir leur passeport italien. En effet, il a certainement dû subitement s’illuminer lorsqu’elle s’est aperçue que nous n’étions pas des citoyens russes… Toujours est-il qu’elle nous a priées de rejoindre une casemate non loin de ce qui s’est avéré être, par la suite, le lieu de notre forfait… Entré dans cette demeure qui m’est instantanément apparue être sombre, voire sordide, la fort sympathique agente, notons-le (…), nous a expliqué que ce parc était un musée, qu’il était interdit d’en toucher les monuments. Elle nous a également signalé qu’elle devait rédiger un rapport (sur une magnifique page blanche, une page d’imprimante en somme), que l’on devait par la suite nous rendre à la banque, payer l’amende et que l’affaire irait au tribunal administratif. C’est à ce moment que l’on aimerait, avant tout autre instant de notre vie, être bilingue, je pense !! Et expliquer à cette chère dame le fond de notre pensée… Malheureusement, ce n’est pas submergée d’émotions, étrangères et si habituées à ne pas se causer de problèmes (et surtout n’ayant aucunement l’envie de s’en faire dans un pays dans lequel nous allons vivre pour une période assez longue), que nous acceptons tant bien que mal notre sort. Après ses explications tirées de nulle part, bien que soutenues par une feuilles signée, qui devait être soi-disant la réplique de ce qui est écrit sur les panneaux aux entrées du parc, elle nous dit, dans un élan de bonté extraordinaire, que si nous lui payons le tout, que l’affaire ne se poursuivrait pas plus. Un inconvénient de plus s’ajoute : le cerveau travaille, dans de telles situations, au ralenti… Toujours est-il qu’après de quelques tentatives de pourparlers peu fructueuses, nous avons réussi à réduire notre peine pécuniaire de 3'000 roubles à 2'000 roubles pour nous trois (ce qui représente 100.-) : nous étions chacune coupable parce que l’une de mes amies avait posé la main sur la statue, moi, parce que j’avais pris la photo, et la troisième d’entre nous, parce qu’elle était avec nous. Comme chacun pourra s’en apercevoir, l’entier de la somme est certainement revenu à l’agente, pour son confort. En espérant seulement que de cet argent, elle en a vraiment besoin. Car, ne dit-on pas, bien mal acquis, ne profite jamais ??

Toujours est-il que ce fut une expérience et que l’on ne mettra certainement pas de sitôt les pieds dans ce parc « gratuit »…