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Univ. de Lausanne, Faculté des Lettres

Section de langues slaves, Option linguistique

Année 2003-2004,

Prof. Patrick SERIOT

Semestre d'hiver. Séminaire de licence :


(le mercredi de 17 h à 19 h, salle 5093)

La construction des identités nationales en Europe de l'Est par le discours sur la langue.



26 novembre 2003 : ukrainien ou ruthène?



Compte-rendu par Daria Busset.

La question de langue en Ukraine Sub-Carpathique.

Périodes :

1. XVI – XVII siècles. L’absence de frontières naturelles entre les tribus a causé des difficultés linguistiques dans la région de la Transcarpathie / Subcarpathie
Il y avait une légère  différence de dialectes entre les tribus  voisines mais les dialectes de peuples un peu éloignés l’un de l’autre étaient incompréhensibles pour eux. Ce qui posait un grand problème pour la centralisation de la population autour de la religion.

Langue du culte – sacrée ;

Langue de prêche – compréhensible.

L'intelligentsia locale ayant le pouvoir politique voulait créer une langue nationale qui serait la base pour la conscience nationale (croyance dans le fait que la langue est primordiale pour la création de l'Etat).
Dilemme : Nouvelle langue ou utilisation d’une langue déjà existante ( latin,  russe, ukrainien, slovaque, hongrois ) ?
Problème de choix : la dignité ou la norme.
Livres  édités : littérature religieuse, calendriers religieux pour les paysans, almanachs.
1649 – Union des Eglises entre Pologne, Lituanie, Hongrie – Uniates.
Les  paroisses orthodoxes acceptent le pouvoir du Pape sans se transformer en catholiques. Tout les symboles, églises, cultes demeurent intactes mais s’est le Pape qui vient désormais en tête de l’Eglise Greco-catholique.  Les catéchismes des Uniates sont en dialecte sub-carpathique, des orthodoxes – en slavon-ruthène. Le véritable slavon était absolument incompréhensible 
Conflit entre les catholiques et les orthodoxes : qui est plus « juste », plus près de la version originale de la Bible dans sa traduction. La seule langue digne selon les uniates – le latin.

2. XVIIIème s. – 1848. Le printemps des peuplea – seulement les sciences naturelles étaient considérées comme véritables sciences. Le peuple était censé se réveiller comme une fleur et recréer la langue.
Plusieurs écrivains, scientistes essayent de transformer la langue du peuple et de la faire plus digne. Dans cette recherche ils se sont tournés vers le vieux slavon et l’ukrainien. Ils ne savaient pas en ce moment là que beaucoup de mot qu'ils pensaient être vernaculaires étaient empruntés au slavon (originaire du sud). Les étudiants de séminaires était obligés de  maîtriser les dialectes locaux pour pouvoir faire le prêche dans les villages.
Pan-slavistes : groupe qui disait que toute les langues slaves ne sont pas des langues indépendantes mais une seule langue ; donc tout les Slaves sont des frères.
1848 – 1er congrès pan-slave à Prague, les délégués s'attendaient à tous parler la même «grande langue slave»  -  échec total, ils étaient contraints de parler en allemand, qui était le seul vectuer panslave véritable..
L’Ukraine sub-carpatique avait le choix entre le russe, le latin, l’ukrainien, le ruthène.
- Diglossie – langue vernaculaire pour la vie quotidienne, la  « haute langue » pour la littérature, la science, religion etc.

3. 1848 – 1918.

Les révoluitions de 1848sont un échec politique, mais il y eut un certain progrès social : abolition du sewrvage en Autriche-Hongrie.
La Croatie a le droit de parler sa propre langue à la diète de Zagreb, tout en étant sous la tutelle hongroise.

Le clivage linguistique :   prosrorechie / literaturnyj jazyk. Chaque type de langage doit être utilisé selon la situation.

1867 -  Ausgleich : «compromis» autro-hongrois : Le gouvernement autrichien laissait aux Hongrois une large autonomie. En particulier la politique linguistique était du strict ressort des autorités locales -> politique de magyarisation (&Mac173; relative tolérance sur les territoires administrés par les Autrichiens)
En Ukraine Subcarpathique : 1867 – 1918  -  mouvement russophile : la seule possibilité d’éviter l’assimilation  par le hongrois – utiliser la langue russe. Mais les relations avec la Russie étaient tendues en ce moment, le passage de livres et les communication étaient difficiles.
En plus, le gouvernement hongrois était russophobe et comptait tout les russophiles pour des traîtres.

4. 1918 –1945. Tchechoslovaquie.

Trois orientations linguistiques et idéologiques :

a) Russophiles : La totalité des Slaves  de l'Est sont les enfants d’une même langue, donc le russe doit être la seule «literaturnyj jazyk». Les émigrants russe se sont installés en Tchécoslovaquie et ont commencé d’enseigner le russe.

b) Ruthénophiles : La langue de l'Ukraine sub-carpathique est une langue à part entière, il faut donc rester soi même.

c) Ukrainophiles : Les 3 langues sont différentes. Il faut créer les dictionnaires et retourner aux racines.

Comme les dialectes de villes et de montagnes étaient différents, certains pensaient trouver la source de la langue pure, langue qui n’est pas gâtée par les paysans et la vie en ville, à la montagne.

5. 1945 – 1989.

Pour le gouvernement soviétique, il n’est pas question de différentes langues ukrainiennes – tout le monde doit parler l'ukrainien sur le territoire de la nouvele République socialiste soviétique d'Ukraine. Les Ruthènes sont des Ukrainiens. 

6. 1989 - …

Plus tard les choses se compliquent : certains Ruthènes ont déclaré qu’ils ne sont ni Russes, ni Ukrainiens, et qu’ils veulent parler le ruthène, leur seule langue vernaculaire.

BIBLIOGRAPHIE


— HUSNAJ I. : Jazykovyj vopros v Podkarpatskoj Rusi, Presov, 1921.

— JAKOBSON R. : «Neue Arbeiten zur Vergangenheit Karpathorusslands», Slavische Rundschau, 3, 1931, p. 512-515.

— KADLEC Karl : «Les Russes du Sud des Carpathes, citoyens de la République tchécoslovaque», La Nation tchèque, juillet-août 1919.

— Paul Robert MAGOCSI : The shaping of national identity : Subcarpathian Rus' : 1848-1948, Cambridge (Mass); London : Harvard Univ. Press, 1978 [hist 943.9 // KA 27532].

— Paul Robert MAGOCSI : «The Language Question in 19th Century Galicia», in PICCHIO R., GOLDBLATT H. (eds.) : Aspects of the Slavic Language Question, Yale Concilium on International and Area Studies, 1984 [ru 808.1 // TVA 26038].

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— Paul Robert MAGOCSI : «A New Slavic Language is Born», East European Politics and Societies,vol. 9, n. 3, autumn 1995.

— Paul Robert MAGOCSI : «The Rusyn language question revisited», International Journal of the Sociology of Language, 120 (Minority Languages in Central Europe), Mouton de Gruyter, 1996, p. 63-84.

— Paul Robert MAGOCSI : On the Making of Nationalities There is no End, 2000 [sc po 323.1 // UMA 86817]

— Antoine MARTEL : La langue polonaise dans les pays ruthènes. Ukraine et Russie blanche. 1569-1667, Lille, 1938. [mag. BB 2500]

— UNBEGAUN Boris : L'origine du nom des Ruthènes, Winnipeg : Académie ukrainienne libre des sciences, 1953.

— WEINGART Milos : «Zur Sprachenfrage in der podkarpatská Rus», Prager Presse, 12 IV 1931.

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