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Section de langues slaves, option linguistique // Кафедра славянских языков, лингвистическое направление

L'alphabet analytique abkhaze

Univ. de Lausanne, Faculté des Lettres

Section de langues slaves, Option linguistique

Année 2013-2014

Prof. Patrick SERIOT

Séminaire de licence / Bachelor-3 / Master

Compte-rendu du cours par Bettina Karli

L’utopie de latiniser l’alphabet russe 

Après la révolution, en 1918, l’édification linguistique faisait partie du programme bolchévique.  Les buts de l’époque postrévolutionnaire étaient d'enseigner à lire et écrire aux peuples qui ont déjà un alphabet et d'élaborer un alphabet en modifiant l’alphabet latin pour ceux qui n’ont  pas encore d’alphabet (бесписьменные языки = les langues non-écrites) afin d’éliminer l'analphabétisme en Union Soviétique. C'est la politique du « likbez » (ликбез  = likvidatsija bezgramotnosti : ликвидация безграмотности)

Le choix est influencé selon Vladimir M. Alpatov (1996) par des aspects politiques, scientifiques et psychologiques. En outre, il dit que pendant les périodes de transformation sociale et de changements d’orientation culturelle, ce sont les aspects politiques qui dominent.

Les dates clés de l’édification linguistique (языковое строительство) :

1920 : Le paradigme d’ouverture, l’internationalisme, la langue artificielle                                           

1922 : Créer des alphabets

1926 : 1er congrès de turcologie à Bakou pour tous les peuples turks de l'URSS. Les  meilleurs linguistes et les leaders bolchéviques se réunirent. Le choix était entre l’alphabet latin et arabe. Discussion : Selon Alpatov l’alphabet latin a un caractère facile,  il est facile à imprimer, donc plus économique, et, employé pour un grand nombre de langues. En outre, il est vu comme plus neutre politiquement et considéré comme  international. Il est plus beau, plus net et plus commode pour l’écriture et pour la lecture. Mais, l’alphabète latinisé pour qui ?  Pour le peuple turc ? Pour les Turks et les Caucasiens ? Pour toutes les langues sauf le russe ? Inclure le russe? Pour les prolétaires du monde entier ?

1927: 1e Plénum du Comité Central du Nouvel Alphabet Turk ; Selon Yevgeny D. Polivanov l’alphabet russe est un concurrent.

1928 : 3e Plénum : On favorise l’alphabet latin.  Pour le linguiste Nikolaij F.Jakovlev, la question de latiniser l’alphabet comme système international d’écriture ne se pose pas seulement pour les peuples turko-tatares, mais aussi pour les Russes. Selon Dzhalaleddin A. Korkmasov, un politicien du Daghestan,  l’alphabet  latin est «révolutionnaire» par rapport à l’alphabet arabe, qui est traditionnaliste. Mais, cela ne faciliterait pas le rapprochement culturel de ces pays avec les Russes. Pour unifier les écritures avec celle de l’Union soviétique, il ne serait pas mieux de les russifier. Mais pourquoi les latiniser ?                                                                                                           

1930 : diffusion  et l’adaptation de l’alphabet latinisé en USSR à l’exception de la langue russe

Mai 1930: 4e Plénum: U. Mamaev, le président de la section Ouzbek de l’Institut de l’Orient, propose d’élargir la latinisation à l’alphabet russe. Dans ce contexte Jakovlev,  et le politicien Anatoli V. Lounatcharski reviennent aux arguments de 1926 (les avantages physiologiques, didactiques et économiques de l’alphabet latin). Mais, tous ces arguments techniques/linguistiques masquent des arguments politiques.  Le système latin est conçu comme neutre et international (rapprochement de  l’Occident et de l’Orient). Mais on veut se libérer de l’influence prérévolutionnaire tsariste, d’exploitateur et chauviniste grand-russe qui est représentée par  l’alphabet cyrillique.

1933 : Le discours officiel de Staline décide l’échec de l’alphabet latinisé. Déjà en 1929, Lunatcharski a été écarté de ses fonctions et la sous-commission a été dissoute.

1938: Dissolution du Comité Central Fédéral du Nouvel Alphabet suite à la suppression du présidium du conseil pour les nationalités.

Après 1939, passage à la cyrilisation générale des alphabets latinisés.

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