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Section de langues slaves, option linguistique // Кафедра славянских языков, лингвистическое направление


W. von Humboldt (1767-1835)

Univ. de Lausanne, Faculté des Lettres

Section de langues slaves, Option linguistique

Année 2013-2014

Prof. Patrick SERIOT

Séminaire de licence / Bachelor-3 / Master

(automne 2013, le mardi de 15 h à 17 h, salle 5093)

Le romantisme : littérature et linguistique

 

Compte-rendu de la séance du 25 février 2014 : Introduction, par Denise Mammino

LE ROMANTISME : langue et nation

INTRODUCTION

L’idéologie romantique, en plus d'affirmer l’opposition entre langues organiques et langues mécaniques, montre, comme trait caractéristique, un sentiment de nostalgie profonde d’un paradis perdu. En effet, pour les romantiques, la perfection était avant et les langues auraient perdu la possibilité créatrice qu’elles avaient au début. Les ancêtres, effectivement, étaient considérés comme des poètes dont la langue était le moyen de communication qui ne montrait aucune confusion interne. Dans cette optique les romantiques s’opposent à l’idéologie du progrès et de la raison exaltée pendant le siècle des Lumières.

LES PRINCIPES DU ROMANTISME

Les principes fondamentaux soutenus par les romantiques sont :

-        le refus de la monogenèse des langues puisque, pour eux, dés le début, toutes les langues étaient différentes. Evidemment, cette vision contraste avec la vision chrétienne selon laquelle, au principe, il y avait l’unité des langues et seulement ensuite la différentiation des langues qui s’est produite comme conséquence d’une punition divine (tour de Babel). Ces considérations peuvent avoir des conséquences sur le plan politique puisque, souvent, on pense que cette séparation initiale, soutenue par les romantiques, suppose une différentiation des hommes, ce que, à bien vouloir dire, constituerait un des principes de l’affirmation du racisme.

-        Parallélisme entre la structure grammaticale du sanskrit et la perfection de sa religion et philosophie. Cette conviction nait de l’idée que la pensée dépend de notre langue et donc, une structure linguistique parfaite implique une pensée parfaite. Il s’affirme donc un lien de nécessité entre forme et contenu.

-        Relation entre langue et culture qui constituent l’expression de l’esprit du peuple (Volksgeist).

-        Intérêt pour les traditions nationales et pour la poésie primitive. Ils s’intéressent surtout à la culture populaire, chacune différente et singulière, et refusent l’universalisme.

-        « Invention du peuple » : ils cherchent la spécificité de la culture populaire et, s’il n’existe pas, ils l’inventent (cf. «Ossian» de McPherson).

LA CONTRIBUTION DE HUMBOLDT

Un des intellectuels romantiques les plus importants de cette époque est Humboldt. Il s’intéresse à la diversité des langues et surtout aux conséquences que cette diversité peut avoir sur la pensée. Ses réflexions peuvent être résumées ainsi :

-        il fait une classification typologique qui explique l’évolution des langues en trois stades : 1- apparition d’une langue ; 2- formation de la structure ; 3- stabilité de la structure atteinte.

-        Il veut remonter à l’origine des langues et, puisque c’est impossible de connaitre la vérité sur cette question, il établit un postulat : il dit que le langage est une capacité innée qui nait avec l’homme. 

-        Pour lui la perfection était au commencement et après la genèse la force créatrice aurait commencé à diminuer.

-        Il fait l’équivalence de langue et pensée, puisque si on n’a pas les mots pour penser on ne peut pas penser (pour Goethe l’âme du peuple se trouve dans sa langue). Cette équivalence langue=pensée amène à une conception déterministe selon laquelle tous ceux qui parlent la même langue pensent de la même manière, ce qui amènerait à un autre problème quant à la définition d’une frontière linguistique.

-        La supériorité de la structure d’une langue montre la supériorité d’un peuple (on peut reprendre l’exemple du sanskrit).

Avec les frères Schlegel on arrive à une classification de type morphologique qui distingue entre langues isolantes (ex : chinois), agglutinantes (ex : turc) et flexionnelles (ex : latin), ces dernières étant meilleures à cause de la distinction entre objet et relation que la flexion rend possible. Pour les deux frères ces étapes constituent les stades d’évolution des peuples, mais pour Humboldt il s’agit de trois étapes du développent de la pensée.

CONCLUSION

Pour résumer, dans la vision romantique la langue est toujours un phénomène collectif qui appartient au peuple entier et constitue aussi le produit de la conscience linguistique de la nation outre qu’une façon de voir le monde. En d’autres mots, elle possède en soi son contenu et les romantiques ne conçoivent pas de pensée sans les formes de la langue (langue=pensée).

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