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Section de langues slaves, option linguistique // Кафедра славянских языков, лингвистическое направление


Viktor Žirmunskij (1891-1971)

Univ. de Lausanne, Faculté des Lettres

Section de langues slaves, Option linguistique

Année 2013-2014

Prof. Patrick SERIOT

Séminaire de licence / Bachelor-3 / Master

(automne 2013, le mardi de 15 h à 17 h, salle 5093)

Le romantisme : littérature et linguistique

 

Compte-rendu de la séance du 11 mars 2014 : Русская романтическая критика / La critique romantique russe (1), par André Bovart

Ouvrage de référence : L'Absolu littéraire. Théorie de la littérature du romantisme allemand par MM. Lacoue-Labarthe et Nancy

Le romantisme est d'abord une théorie, qui s’interroge sur son propre fonctionnement. C’est un mouvement littéraire qui tend vers l’absolu. La pensée du genre littéraire concerne donc moins la production de la chose littéraire que la production elle-même. En d’autres termes, le processus est plus important que le résultat. La pensée romantique entend pénétrer l’essence. L’esthétique romantique est en opposition à celle développée par le siècle des Lumières.

A noter aussi l’importance des cycles, en particulier le cycle nocturne, que l’on retrouve dans les littératures allemande, française et russe. La couleur noire de la nuit est une trame narrative, la nuit est la révélation de la vérité romantique, peuplée par des rêves, parfois provoqués par des moyens artificiels (Byron, Ann Radcliffe par exemple).

Le dispositif de la nuit est à plusieurs niveaux : le thème (autre côté du miroir), la rupture entre l’art et la vie, les cycles (veillées, soirées, aube) qui remplacent les chapitres (Voir notamment Gogol et  E.T.A. Hoffmann (1776-1822)). C’est un élément de la narration, elle représente l’organisation et la justification du récit, le rêve étant la synthèse de tous les arts (voir à ce sujet la thèse de doctorat de Victoire Feuillebois  « Nuits d’encre : les cycles de fictions nocturnes à l’époque romantique (Allemagne, Russie, France »).

La théorie esthétique romantique est une destruction de l’esthétisme classique, ce dernier étant considéré comme un art codifié, moral, copié des anciens et limité par la mesure, l’ordre et l’équilibre. L’esthétique romantique est aussi contre la hiérarchie des styles, attaque les règles de bienséance, la vraisemblance classique et la règle des 3 unités. C’est le monde carnavalesque de Bakhtine.

Gottfried von Herder, poète, théologien et philosophe allemand (1744-1803), mentor de Goethe, a vivement critiqué la théorie des Lumières, exerçant une grande influence sur l’intelligentsia russe. L’histoire est l’accomplissement des peuples, celui de l’individu l’est par la poésie et la philosophie. Voir, outre son triangle sacré (unité de la poésie, de la philosophie, de l’histoire), son chapitre sur les slaves, qu’il décrit comme des gens paisibles, secourables, humbles, dociles et honnêtes, alors que Pouchkine dit lui que chaque peuple possède en propre sa manière de penser et de sentir, ses mœurs, ses croyances et ses usages ; le climat, le mode de gouvernement, la foi donnent à chaque peuple une physionomie particulière qui se reflète plus ou moins dans le miroir de la poésie.

Le romantisme est aussi une réaction à un contexte historique bien particulier, opposant le spleen (réalité) à l’idéal, avec un retour sur le folklore, la couleur locale (W. Scott), mettant en valeur l’exotisme, la nature, le tout parfois sur un terrain naïf ou primitif (Fenimore Cooper et ses héros courageux et honnêtes). Victor Hugo (1802-1885), dans la préface de Cromwell, défend le drame romantique, déclenchant aussi «la bataille d’Hernani »  lors de la représentation de ce drame romantique quelque 3 ans plus tard. Voir également en Russie au début du XIXème siècle la découverte du poème épique en ancien russe « Le Dit de la campagne d’Igor ».

Viktor Zhirmunsky (ou Žirmunskij), historien et écrivain russe, publia en 1920 un article déterminant, opposant au niveau typologique poésies classique et romantique.  Selon lui, l’écrivain classique travaille comme un architecte qui construit, solidement, un bâtiment, alors que le romantique est un individuel, limité uniquement par son libre arbitre.

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