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Centre de recherches en histoire et épistémologie comparée de la linguistique d'Europe centrale et orientale (CRECLECO) / Université de Lausanne // Научно-исследовательский центр по истории и сравнительной эпистемологии языкознания центральной и восточной Европы

-- Sébastien Moret (Université de Lausanne): Les comptes-rendus de Meillet sur la question d’une langue internationale artificielle

Proposition de contribution à l’atelier
« Linguistique grise. Le compte-rendu et ses apports à l’histoire de la linguistique »
ICHoLS XV – Milan, 24-28 août 2019

 

 

 

Une publication récente (Moret 2019) a montré que c’était presque essentiellement à travers des comptes-rendus que Meillet avait exprimé ce qu’il pensait des idées du linguiste soviétique Nikolaj Marr (1867-1934), comme si l’on ne pouvait aborder ces dernières (rejetées par la majorité des linguistes européens) que dans le cadre de recensions spécialement consacrées. C’est aussi ce qui semble apparaître avec la thématique « sensible » des langues internationales artificielles (désormais LIA).
            On sait que Meillet s’était exprimé positivement sur le sujet dans Les langues dans l’Europe nouvelle (Paris : Payot, 1918), où il avait jugé nécessaire une LIA dans le contexte d’une Europe de plus en plus culturellement une, mais de plus en plus morcelée linguistiquement. Mais, à part énoncer une préférence (peu argumentée) pour l’ido face à l’espéranto, Meillet n’avait fait que donner son avis sur la question générale d’une LIA. Si l’on veut des détails et des arguments, c’est dans les comptes-rendus sur le sujet qu’il faut se plonger.
            On dénombre en tout cas, dans la bibliographie de Meillet, treize recensions d’ouvrages consacrés au problème d’une LIA, parues essentiellement dans le Bulletin de la Société de linguistique de Paris et la Revue critique d’histoire et de littérature. Meillet a, entre autres, recensé le célèbre texte Zur Kritik der künstlichen Weltsprachen (1907) des néogrammairiens Brugmann et Leskien, et la réponse qu’il suscita chez Baudouin de Courtenay (« Zur Kritik der künstlichen Weltsprachen », 1908). Mais Meillet s’exprima aussi sur des ouvrages consacrés à d’autres LIA que l’espéranto, comme l’ido, l’occidental (1922) ou le novial (1928) de Jespersen. Quant à la théorie des LIA, elle fut abordée à partir de l’ouvrage de René de Saussure sur les Principes logiques de la formation des mots (1911).
            Comme je le montrerai, l’analyse des recensions de Meillet sur la question d’une LIA permet d’appréhender plus en profondeur ce qu’il pensait du sujet, et, surtout, de dévoiler certaines de ses considérations théoriques. Enfin, on redira l’importance des comptes-rendus pour se faire une idée la plus complète possible de ce qu’un linguiste pense, surtout quand il s’agit, comme dans le cas des LIA, d’un sujet « sensible » et parfois déconsidéré par la linguistique « traditionnelle ».

Bibliographie

Sébastien Moret, « Meillet et Marr », in S. Moret, A. de La Fortelle (dir.), Histoire des linguistiques, histoire des idées. Mélanges offerts à Patrick Sériot, Moskva : Ogi, 2019, pp. 361-399