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Centre de recherches en histoire et épistémologie comparée de la linguistique d'Europe centrale et orientale (CRECLECO) / Université de Lausanne // Научно-исследовательский центр по истории и сравнительной эпистемологии языкознания центральной и восточной Европы

-- W. Doroszewski : «Quelques remarques sur les rapports de la socio logie et de la linguistique : Durkheim et F. de Saussure»[1], Journal de psychologie normale et pathologique, 1933, n° 1-4, p. 82-91.

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        1. — On sait la place que tient en linguistique générale la thèse : «la langue -est un fait social». Un tel principe ne peut être, au fond, ni contesté, ni affirmé, et l'essentiel — comme dans tous lescas de ce genre — est de préciser le sens des termes que l'on emploie. II est d'une part évident que la langue qui sert à plus d'un individu a par là même un caractère nettement et éminemment social — ceci lorsqu'on s'en tient au sens courant (et non empreint d'une tendance spécifique quelconque) des mots «langue» et «social». D'autre part, cette évidence même pousse à se demander quelle raison peut faire insister sur une vérité qui est à la portée de tout le monde et dont tout le monde, plus ou moins consciemment, se rend compte. La thèse en question, d'apparence aussi simple, pour autant qu'elle serve de principe de méthode, doit être prise en un sens spécial. Ce sens, les partisans de la doctrine sociologique en linguistique l'indiquent nettement : c'est le sens durkheimien.
        Pour se rendre exactement compte de la responsabilité que l'on assume en souscrivant aux définitions de Durkheim, il faut bien voir de près quelles sont ces définitions et quels sont les principes de méthode qu'elles comportent. II s'agit surtout d'analyser le «fait social» qui sert de qualificatif à la «langue», et qui, dans la doctrine de Durkheim à laquelle il a été emprunté, occupe la place cen-
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trale. Pour faire mieux ressortir les traits du «fait social» durkheimien, rappelons brièvement quelques points essentiels de la doctrine de Durkheim.

        2. — Le dessein de Durkheim était, on le sait, de donner à la sociologie la rigueur des autres sciences, plus formées et plus avancées.   

        a. Pour que la sociologie pût devenir une science  autonome, il fallait qu'elle eût son propre objet, bien distinct des objets des autres sciences. Conformément à ses tendances, parfois nettement déductivistes, Durkheim cherchait une définition préalable de l'objet de la sociologie qu'il créait, définition qui devait circonscrire et délimiter d'avance le champ des explorations futures du sociologue (ce champ est d'ailleurs toujours resté pour Durkheim extrêmement vaste). N'ayant pas, d'autre part, de tendance matérialiste (contrairement, remarquons-le, à ce qui a été assez souvent affirmé), Durkheim caractérisait lui-même sa doctrine comme empreinte d'une «hyper-spiritualité»[2], et c'est dans le domaine des faits d'ordre spirituel qu'il cherchait le substrat essentiel des recherches sociologiques.
        «La vie collective..., constatait Durkheim, est faite de représentations»[3], la société est essentiellement «un ensemble d'idées», et c'est sous cette forme qu'elle apparaît au sociologue.
        II est évident que, du moment que l'on parle de représentations, il est nécessaire de délimiter cet ordre de phénomènes par rapport aux autres phénomènes psychiques.

        b. Durkheim se rendait bien compte de la nécessité de déterminer les rapports réciproques de la sociologie et de la psychologie. En principe, le départ qu'il tendait à établir entre les deux sciences était rigoureux et définitif. Pourtant, les travaux mêmes de Durkheim ne donnaient pas toujours raison à ce postulat. Durkheim constatait par exemple ouvertement qu'il réservait le nom de sociologie «pour tout ce qui concerne la mentalité collective»; — et qui ne sait combien de psychologues se sont intéressés au même sujet ?
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        Ailleurs, Durkheim avouait expressément que «la psychologie collective, c'est la sociologie tout entière». «Pourquoi donc, demandait-il, ne pas se servir exclusivement de cette dernière expression?»[4]. Il est donc manifeste que la sociologie de Durkheim conservait avec la psychologie des rapports intimes, voire indissolubles, et ceci en raison du caractère de certaines définitions initiales, dont l'auteur semblait ne pas voir toutes les conséquences.
        Puisque la vie collective est faite de représentations, c'est l'analyse des représentations qui conduira le sociologue à la constitution du «fait social» devant servir de base et de point d'appui à toutes ses recherches.

        c. Parmi les représentations Durkheim distinguait deux catégories fondamentales. L'une est constituée par les représentations qui ont pour substrat les consciences particulières des membres du groupe social : ce sont les «représentations individuelles» (nous dirions peut-être : représentations tout court), opposées par Durkheim aux «représentations collectives» dont nous verrons tout à l'heure les caractères distinctifs.         
        Voici ce que constatait Durkheim en rapport avec la première de ces deux catégories.
        Certains psychologues (Huxley, Maudsley) considèrent que la vie psychique de l'homme n'est qu'un «épiphénomène» accompagnant les modifications d'intensité et de qualité que subit incessamment la matière nerveuse. Durkheim s'élevait avec force contre cet «épiphénoménisme» qui aboutit, selon lui, à la négation de l'existence de la vie psychique proprement dite. Si les représentations n'existaient qu'en fonction des modifications physiologiques des cellules cérébrales, elles ne seraient rien par elles-mêmes. Et pourtant «notre vie psychique ne s'anéantit pas à mesure qu'elle s'écoule»[5], «il y a une mémoire proprement mentale»[6], qui assure l'existence, en quelque sorte autonome des représentations. Les représentations sont indépendantes des cellules d'un cerveau particulier, à preuve qu'elles peuvent réapparaître à la surface de la conscience après en
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avoir été absentes pendant un certain temps. Si le phénomène du ressouvenir peut se produire, c'est que les représentations, durant le temps où elles n'étaient pas présentes à la conscience de l'individu, ont mené une existence indépendante des cellules cérébrales dans lesquelles elles ne peuvent être localisées. «Indépendante» veut dire extérieure aux cellules, et ainsi on est amené à constater que les représentations «individuelles» ont ce trait fondamental d'être indépendantes des cellules d'un cerveau particulier et d'être extérieures à ces cellules.
        Nous touchons ici le punctum saliens de la doctrine et des raisonnements de Durkheim, car c'est après avoir caractérisé de la manière que nous avons vue les représentations «individuelles» qu'il fait cette comparaison, cette analogie, ce saut qui le transportent d'un coup dans le domaine de ses «faits sociaux»; de même que les représentations «individuelles» sont extérieures aux cellules d'un cerveau particulier, de même certaines représentations sont extérieures aux cerveaux de tous les membres d'un groupe social. C'est cette deuxième catégorie de représentations qui intéresse surtout, et, au fond, uniquement, le sociologue. Ce sont les représentations «collectives» qui constituent les «faits sociaux» par excellence. Elles sont foncièrement différentes des représentations individuelles et ne peuvent qu'être «en quelque manière comparables»[7] à celles-ci. Les représentations collectives sont «d'une autre nature» que les représentations individuelles, et l'analyse de ces dernières ne nous est utile qu'en tant qu'elle nous aide à comprendre de quelle manière les faits sociaux sont extérieurs aux individus.
        «Quand nous avons dit, remarquait Durkheim,... que les faits sociaux sont, en un sens, indépendants des individus et extérieurs aux consciences individuelles, nous n'avons fait qu'affirmer du règne social ce que nous venons d'établir à propos du règne psychique»[8]. «Si l'on ne voit rien d'extraordinaire à ce que \es représentations individuelles produites par les actions et les réactions échangées entre les éléments nerveux, ne soient pas inhérentes à ces éléments, qu'y a-t-il de surprenant à ce que les représentations col-
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lectives, produites par les actions et les réactions échangées entre les consciences élémentaires dont est faite la société, ne dérivent pas directement de ces dernières et, par suite» les débordent? Le rapport qui, dans la conception, unit le substrat social à la vie sociale est de tous points analogue à celui qu'on doit admettre entre le substrat physiologique et la vie psychique des individus» [9].
        Cette conception peut bien nous paraître — ainsi, qu'elle a paru à M. Lacombe — déconcertante, mais, sans insister sur la critique, résumons simplement ce qui a été établi jusqu'à présent : les faits sociaux — qu'il faut définir pour que la sociologie ait un objet — sont : 1° des représentations; 2° des représentationscollective, c'est-à-dire des «manières d'agir, de penser et de sentir extérieures à l’individu»; 3° des représentations douées «d'un pouvoir de coercition en vertu duquel ils [les faits sociaux] s'imposent à l’individu»[10]. Ce dernier trait — la contrainte que les faits sociaux exercent sur les individus — est peut être le plus marquant et celui sur lequel Durkheim a le plus insisté.
        Les faits sociaux ainsi caractérisés ne sauraient, selon Durkheim,  «se confondre avec les phénomènes organiques, puisqu'ils consistent en représentations et en actions.» — ce qui n'est pas fait pour nous surprendre. Ce qui peut paraître plus étonnant, c'est que les «faits sociaux» — consistant «en représentations et en actions» — sont distincts, pour Durkheim, non seulement des phénomènes organiques, mais aussi «des phénomènes psychiques, lesquels n’ont d'existence que dans la conscience individuelle et par elle»[11].

        d. Une telle délimitation incline à demander où existent et comment existent des représentations qui ne sont pas des phénomènes psychiques. On conçoit difficilement une existence de représentations autre qu'une existence psychique, et on ne peut comprendre les représentations comme étant autre chose que l'activité «représentatrice» des hommes.
        A la question que l'on vient de poser : où et comment existent les «faits sociaux?» il n'y avait qu'une réponse logiquement conciliable
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avec les principes fondamentaux de Durkheim. Les «faits sociaux» existent dans la «conscience collective». Il faut remarquer que ce terme n'était pas seulement une façon de parler, une expression fortuite, une image sans importance : bien au contraire, la notion de «conscience collective» constituait, selon la juste expression, de M. Lacombe, la, «clé de voûte» du grand édifice de la sociologie durkheimienne. Sans cette notion, l'unité du système — d'ailleurs apparente — était ruinée. Durkheim parle de la conscience collective à diverses reprises, en soulignant sa nature foncièrement différente des consciences individuelles : «les états de la conscience collective sont d'une autre nature que les états de la conscience individuelle ; ce sont des représentations: d'une autre sorte»[12] ; la conscience collective est «un être psychique si l'on veut»[13] ; «c'est l'agrégat dans sa totalité qu'il faut prendre en considération ; c'est lui qui pense, qui sent, qui veut, quoiqu'il ne puisse vouloir, sentir ou agir que par l'intermédiaire de consciences particulières»[14].
        Tels sont les traits distinctifs des «faits sociaux» : ce sont : 1° des représentations; 2° des représentations extérieures aux consciences individuelles; 3° des représentations douée» d’un pouvoir de coercition en vertu duquel elles s'imposent aux individus» ; 4° des représentations ayant pour substrat et support la «conscience collective». Voilà donc les caractères que l'on attribue à la «langue» lorsqu'on la qualifie de «fait social» au sens durkheimien de ce terme.

        3. — Nous avons jusqu'ici analysé le prédicat de la thèse : «la langue est un fait social». Analysons-en maintenant le sujet : la «langue».
        Il s'agit ici, on, le sait, de la «langue» au sens saussurien de ce terme. Il serait superflu d'exposer ici dans le détail les conceptions de Ferdinand de Saussure sur la nature de la «langue», mais il faut cependant, pour accentuer le relief des problèmes traités, rappeler brièvement l'essentiel des idées saussuriennes, dont certaines sont aujourd’hui presque universellement admises par les linguistes[15],
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ce qui est une raison de plus pour qu'elles soient soumises à une analyse critique.

        4. — F. de Saussure ne croyait possible d'assurer une vraie rigueur scientifique à la linguistique qu'en posant une définition initiale de ce qui pourrait faire l'objet «à la fois intégral et concret»[16] de cette science. Déductiviste, il constatait que «c'est le point de vue qui crée l'objet»[17] et enseignait que, pour qu'une linguistique organisée et ordonnée fût possible, il fallait «se placer de prime abord sur le terrain de la langue et la prendre pour norme de toutes les autres manifestations du langage»[18] qui, parce que multiforme, hétéroclite et manquant d'homogénéité, est essentiellement inconnaissable. Ce n'est qu'en découpant dans le tout confus du langage cette réalité que F. de Saussure appelait la «langue» que l'on assure, selon lui, un terrain solide à la linguistique, dont la «langue» est «l'unique et véritable objet»[19], tout ce qui est du domaine de la «parole» n'intéressant pas directement le linguiste.
        Quel était, selon F. de Saussure, le rapport de la linguistique à la psychologie? Il est assez important de préciser ce point, d'autant plus que certaines tendances anti-psychologistes, actuellement assez fortes, sont parfois rattachées directement à Saussure — ce que l'état objectif des choses ne justifie pas pleinement.
        Voici comment lui-même s'exprimait sur les rapports de la linguistique avec les disciplines psychologiques : «On peut concevoir, écrivait-il, une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale; elle formerait une partie de la psychologie sociale et par
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conséquent de la psychologie générale... La linguistique n'est qu'une partie de cette science générale». «C'est au psychologue de déterminer la place exacte de la sémiologie»[20]. L'étude de la langue était conçue par F. de Saussure comme «uniquement psychique»[21], le signe linguistique unissant «non une chose et un nom, mais un concept et une image acoustique»[22] — formulation dénotant une tendance que l'on pourrait presque appeler «psychologiste» (sans parler dé la difficulté que l'on éprouve à comprendre ce qui est visé parle terme «signe linguistique», puisqu'il ressort de la formule que ce «signe» est autre chose qu'un nom, qu'une dénomination).
        Il est manifeste que la linguistique conservait, dans l'idée de Saussure, d'étroits rapports avec la psychologie et que l'autonomie relative qu'il voulait assurer à la linguistique ne comportait pas un affranchissement de cette science à l'égard des méthodes «psychologiques».
        La «langue» était comprise par F. de Saussure d'une façon assez abstraite : ce qui importait pour lui en linguistique, ce n'était pas l'étude du jeu de l'appareil vocal, car «l'essentiel de la langue est étranger au caractère phonique du signe linguistique»[23], mais bien plutôt l'étude de la «faculté qui commande aux signes»[24].
        La «langue», bien qu'essentiellement psychique, était en même temps pour F. de Saussure «sociale dans son essence et indépendante de l'individu»[25], et cette indépendance de la langue par rapport à l'individu était maintes fois soulignée — indépendance synonyme d' «extériorité» («pour F. de Saussure la langue est essentiellement un dépôt, une chose reçue du dehors» — note des éditeurs du Cours, p. 98) et en même temps de résistance absolue à toutes les influences individuelles : la langue «est la partie sociale du langage, extérieure à l'individu»[26]; elle est «de toutes les institutions sociales celle qui offre le moins de prise aux initiatives»[27]. Son trait essentiel
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consiste en ce qu'elle s'impose aux individus par la contrainte de l'usage collectif ; «si l'on veu tdémontrer que la loi admise dans une collectivité est une chose que l'on subit et non une règle librement consentie, c'est bien la langue qui en offre la preuve la plus éclatante»[28].
        Bien que F. de Saussure eût eu recours à la notion de la conscience collective moins souvent que ne le faisait. Durkheim, il ne s'est pourtant pas passé de ce terme et, par conséquent, de cette conception : «La linguistique synchronique, constatait-il par exemple, s'occupe des rapports logiques et psychologiques reliant les termes coexistants et formant système, tels qu'ils sont aperçus par la même conscience collective»[29].
        On voit en somme que la «langue» de Saussure non seulement correspond exactement au «fait social» de Durkheim, mais encore que cette langue, mi-psychique et mi-sociale, extérieure à l'individu, exerçant une contrainte sur l'individu et existant dans la conscience collective du groupe social, était en quelque sorte modelée sur les «représentations collectives» de Durkheim. Au fond, «langue» et «fait social» ne font qu'un, celle-là n'étant qu'une manière de réplique, d'illustration de celui-ci.
        Quiconque voudrait chercher les soubassements méthodologiques — on pourrait aussi dire philosophiques — de la doctrine de Saussure devrait se tourner vers la doctrine de Durkheim, où trouve posée avec une rigueur absolue et systématique l’opposition du social à l'individuel se reflétant comme l'opposition, non moins absolue en principe, de la «langue» à la «parole» dans le Cours de Saussure.

        6. — Concluons. Les linguistes recourent très souvent à la thèse saussurienne qui définit la langue comme un fait social (voir plus haut, p. 87, note 4). Dans cette thèse, au fond, le sujet et le prédicat ne font qu'un; la «langue» de Saussure, reproduisant le «fait social» de Durckheim. La doctrine de Saussure est presque toujours considérée comme une doctrine linguistique; or ce n'est pas tout à fait exact. Cette doctrine s'appuie essentiellement sur une conception philosophique étrangère au fond à la linguistique.
        F. de Saussure — je le sais de source certaine — suivait avec un
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profond intérêt le débat philosophique engagé entre Durkheim et Tarde. Si l’on prend en considération non seulement l'idée, essentielle pour Saussure, de la «langue», mais aussi celle, complémentaire, de la «parole», l'ensemble de la doctrine saussurienne apparaît alors comme une curieuse tentative, entreprise par un linguiste de génie, pour concilier les doctrines opposées de Durkheim et de Tarde. Dans l'opposition de la «langue» à la «parole» on entrevoit l'opposition de l'idée durkheimienne à celle de Tarde. Le rigorisme de la notion de la «langue» est durkheimien, les concessions faites au facteur individuel, à la «parole» tiennent des idées de Tarde. Ceci paraît digne d'être souligné.
        Toutes les branches, des humaniora s'entrelacent. La doctrine saussurienne qui a connu un retentissement si considérable en linguistique doit son élan à des notions élaborées dans les domaines de la sociologie, de la philosophie et de la psychologie.
        Non seulement, malgré la diversité de ses compartiments, la linguistique est une, mais l'homme est un et toutes les sciences qui ont pour objet l'étude, de l'homme convergent vers un seul but et se heurtent aux mêmes problèmes. Sortir de l'isolement est une nécessité de plus en plus manifeste.

(Varsovie, 1932.)



[1] Cet article reprend, avec quelques modifications, une communication faite au IIe Congrès international de Linguistes, à Genève, le 25 août 1931.

[2] Sociologie et Philosophie, Paris, Alcan, 1924, article Représentations individuelles et représentations collectives, p. 48; cf. aussi ce que dit M. Bouglé dans sa préface à ce recueil, p. xv : «...le sociologisme durkheimien est bien plutôt un effort pour fonder et justifier d'une façon nouvelle les tendances spiritualistes». Cf. encore Lacombe, La méthode sociologique de Durkheim, Étude critique, Paris, Alcan, 1926, p. 16.

[3] Loc. cit., p. 2.

[4] Loc. cit., p. 47.

[5] Loc. cit., p. 20.

[6] Loc. cit., p. 13.

[7] Loc. cit., p. 2.

[8] Loc. cit., p. 33.

[9] Loc. cit., p. 34.

[10] Les règles de la méthode sociologique, 8e édition, Paris, Alcan, 1927, p. 8.

[11]  Ibid.

[12] Les règles…; p. xvi.

[13] Les règles..., p. 127.

[14] Représentations..., p. 36.

[15] Voici par exemple ce qu'écrit M. Porzig dans son article Sprachform und Bedeutung (Indogermanisches Jahrbuch, XII, 1928, p. 3) : «Je mehr die Ansichten auseinandergehen, um so notwendiger ist es, sicht uher die Punkte klar zu sein, die von allen Seiten als gemeinsamer Boden anerkannt sind. Dazu gehört die Unterscheidung von Sprechen [parole] und Sprache [langue] sowie die von synchronischer und diachronischer Sprachbetrachtung». «Von allen [souligné par l'auteur] Seiten» est peut-être un peu exagéré : en écrivant ainsi, M. Porzig laisse de côté, par exemple, Schuchardt et M. Jespersen, sans parler de Baudouin de Courtenay qui, il est vrai, ne s'est jamais exprimé d'une façon explicite sur les idées de Saussure, mais auquel la notion de la «langue» au sens saussurien de ce mot était totalement étrangère. Il est d'autre part incontestable que l'opposition langue-parole posée par Saussure revient très fréquemment dans les travaux des linguistes les plus différents : cette opposition fait partie du «stock» des idées actuellement admises et même enracinées en linguistique. Cette notion est presque «von allen Seiten anerkannt» et elle a déjà pénétré partout où elle pouvait pénétrer.

[16] Cours de linguistique générale, 2e édition, Paris, Payot, 1922, p. 23.

[17] Loc. cit.

[18] Loc. cit., p. 25.

[19] Dernière phrase du cours.

[20] Loc. cit., p. 33.

[21] Loc. cit., p. 37.

[22] Loc. cit., p. 98.

[23] Loc. cit., p. 21.

[24] Loc. cit., p. 27.

[25] Loc. cit., p. 37.

[26] Loc. cit., p. 81.

[27] Loc. cit., p. 107-108.

[28] Loc. cit., p. 104.

[29] Loc. cit., p. 140; cf. aussi p. 19, où il est question d'«esprit collectif».