13 Ec doct
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— 9 h 30 | Accueil des participants |
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— 9 h 45 | Patrick SERIOT (Lausanne) |
Présentation de l'école doctorale et du CRECLECO (Centre de recherches en épistémologie comparée de la linguistique d'Europe centrale et orientale) Présentation du site web du CRECLECO |
— 10 h 00 | Johannes BRONKHORST (Lausanne) |
1) La découverte européenne du sanscrit et de ses grammairiens |
— 12 h 30 | fin de l'exposé | |
— 12 h 45 | repas |
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Après-midi : présentation des travaux de thèse |
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— 15 h 00 | Sébastien MORET (Lausanne) |
La linguistique marxiste soviétique vue de France par deux linguistes « de gauche » : Marcel Cohen et Aurélien Sauvageot |
— 15 h 30 | Elena SIMONATO (Lausanne) |
La boîte à outils du linguiste bolchévique |
— 16 h 00 |
pause |
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— 16 h 30 | Ekaterina ALEXEEVA (Lausanne) |
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— 17 h | Sandra NOSSIK (Besançon) |
Dialogismes, polyphonies et dissonances contemporaines |
— 17 h 30 |
— 9 h 00 | Daniele GAMBARARA (Cosenza) |
1) Les manuscrits de F. de Saussure: problèmes d’édition. 2) Quel héritage de Saussure est encore vivant, cent ans après sa mort? |
— 11 h 30 | Giuseppe COSENZA (Cosenza) | |
— 12 h 30 | repas |
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Après-midi : présentation des travaux de thèse |
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— 15 h | Thomas ROBERT (Genève / Cosenza) : |
Trois théories du langage : Rousseau, Darwin, Saussure et le cas des origines |
— 15 h 30 | Alessandro CHIDICHIMO (Genève/FPSE) |
Recherches sur les manuscrits saussuriens avec histoire, chercheurs, exemples |
— 16 h | pause |
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— 16 h 30 | Mladen UHLIK (Ljubljana-Lausanne) |
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— 17 h | Jean-Baptiste BLANC (Lausanne) |
Problèmes et enjeux de la classification des langues turques |
— 17 h 30 | Natalia BICHURINA (Saint-Pétersbourg / Lausanne) |
Langue et parole dans les « renaissances » linguistiques contemporaines |
— 9 h 00 | Eduardo GUIMARÃES (Campinas, Brésil) |
1) Evénement énonciatif et sens 2) L'espace de l'énonciation et le fonctionnement des langues |
— 11 h 30 |
Roger COMTET (Toulouse) |
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— 12 h 30 | repas |
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Après-midi : présentation des travaux de thèse |
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— 14 h 00 | Anita DEDIC (Lausanne) |
Le purisme croate au XXème siècle vu à travers le prisme de l’ « invention » de la langue tchèque |
— 14 h 30 | Ekaterina VELMEZOVA (Lausanne) |
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— 15 h 00 |
Bilan et perspectives |
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— Ekaterina ALEXEEVA (Lausanne) : Le symbolisme sonore : le problème de l’arbitraire et de la motivation du signe linguistique dans la linguistique soviétique des années 1970-80.
Cet exposé présente deux approches du problème de l’arbitraire et de la motivation du signe linguistique à travers le problème du symbolisme sonore dans les travaux des linguistes soviétiques des années 1970-80.
Une polémique intéressante autour de cette question a eu lieu après une série d’expériences réalisées par le professeur de l’université de Saratov, Ilja Gorelov (1928-1999), connu à l’époque par ses recherches sur la psycholinguistique et le bilinguisme. Certains côtés de ce problème étaient étudiés et discutés dans le livre de Vadim Solntsev[1]Jazyk kak sistemno-strukturnoe obrazovanie [La langue comme formation systémique et structurelle] (Moskva, 1977).
Les expériences associatives de Gorelov, auxquelles participaient les représentants de différentes nationalités, ont permis aux chercheurs soviétiques de se poser questions suivantes : le symbolisme sonore a-t-il un caractère national ou international ? détermine-t-il la langue en tant « système » sémiotique ?
[1] Vadim Solntsev (1928-2000) - linguiste russe, membre de l’Académie des Sciences de Russie, spécialiste des langues de l’Asie du Sud-Est.
— Natalia BICHURINA (Saint-Pétersbourg / Lausanne) : Langue et parole dans les « renaissances » linguistiques contemporaines
Il s’agira d’explorer les mouvements contemporains des « renaissances » linguistiques (ou des constructions linguistiques) et cet objet « langue » qui s’y trouve, en apparence, au cœur des débats. Nous étudierons notamment les cas de l’« occitan » et du « francoprovençal » / « arpitan ».
En empruntant la dichotomie saussurienne, nous essayerons de montrer comment dans le discours linguistique et militant sur ce deux « langues régionales » / « langues en danger » « la parole » se trouve cachée derrière « la langue ».
Dans un premier temps, nous étudierons donc comment cet objet, « la langue », est construit dans le discours épilinguistique. Ensuite, nous mettrons en parallèle ce discours sur la « langue » et les pratiques linguistiques actuelles dans les deux cas étudiés. Nous verrons que « la langue », comme un système abstrait, comme un objet nommé et défini géographiquement et historiquement, semble exister en dehors des locuteurs ; « la langue » devient objet des débats, des revendications et de la politique au moment où « la parole » dans cette langue devient marginale : les locuteurs pour lesquels c’étaient la langue première disparaissent et les usages de l’idiome dans un milieu restreint des militants se trouvent régulièrement réduits aux fonctions symboliques.
— Jean-Baptiste BLANC (Lausanne) : Problèmes et enjeux de la classification des langues turques
En 1971, Gerhard Doerfer, linguiste turcologue de renom, constatant l'existence d'une soixantaine de classifications différentes des langues turques, se demandait si cela ne témoignait pas d'un « défaut fondamental du mode traditionnel de classification des langues ». En cause, selon lui, les modèles traditionnels de l'arbre et des vagues, tous deux par trop dépendants de la subjectivité du classificateur. Depuis lors, une série de classifications sont encore venues s'ajouter à celles recensées à l'époque.
Il y a certes un consensus réel, dès le XIXe siècle, autour d'une division des langues turques en trois grands groupes (Oguz, Kipchak, Ouïgour), basée sur le dictionnaire des dialectes turcs de Mahmud al-Kashgari au XIe siècle qui les posait déjà. Pour le reste, que ce soit sur les critères de classification ou sur la prise en compte de la diachronie par exemple, il n'y pas d'accord. Ces difficultés s'expliquent largement par les importants mouvements de population qui caractérisent l'histoire des porteurs des langues turques. Les premières sources écrites en turc se situent ainsi par exemple dans une région, la Mongolie, qui depuis dix siècles n'est plus turcophone. Ainsi que le dit Lars Johanson, « the dynamic history of the Turkic-speaking peoples makes it difficult to set up a classification of modern Turkic languages that combines geographic and genetic criteria. »
Or le repérage de limites au sein du continuum turc n'est pas seulement d'un intérêt strictement linguistique. Les catégories choisies lors des premiers recensements ethnolinguistiques en Russie, à la fin du XIXe siècle, puis, dans l'URSS des années 1920 et 1930, la délimitation de territoires et républiques nationaux et l'établissement d'une quinzaine de standards linguistiques turcs sont dépendants des classifications linguistiques des parlers turcs, autant en sous-groupes qu'en langues.
On présentera ici plusieurs classifications des langues turques, savantes ou pas, et, ce faisant, on attirera l'attention sur une série de problèmes et questions constitutifs de cet effort de classification. Ainsi par exemple :
Niveau épistémologique de la classification : génétique ou typologique ?
Base de classification : langues standards ou parlers non-standards ?
But de la classification : cherche-t-on des essences ou des types ?
Synchronie, diachronie ou les deux à la fois ?
Correspondance problématique entre dialectes, langues et groupes (le problème du « dialecte Oguz de l'ouzbek » ou du « dialecte Oguz du tatar de Crimée »)
Débat langue/dialecte : (ex : position dominante en Turquie (une langue) vs. turcologie russe (plus de vingt langues))
Problème de la nomination et du rôle des locuteurs : deux parlers nommés par leurs locuteurs au moyen d'un même ethnonyme sont-ils dialectes d'une même langue (exs. : le turkmène d'Irak est-il un dialecte du turkmène ? Le tatar de Sibérie est-il un dialecte du tatar de la Volga ?)
Rôle des critères ethnographiques/religieux ou socio-économiques parallèlement aux critères linguistiques (en particulier dans les premières classifications au XIXe siècle)
Ces questions sont appelées à être développées dans le cours de ma thèse.
Sources citées :
G. Doerfer (1971), « Bemerkungen zur linguistischen Klassifikation », Indogermanische Forschungen, 76, p. 1-14
L. Johanson (1998), « The History of Turkic », in L. Johanson & E. Csató (eds), The Turkic Languages, London, New York : Routledge, pp. 81-125
— Johannes BRONKHORST (Lausanne) :
1) La découverte européenne du sanscrit et de ses grammairiens
La découverte du sanscrit et des grammairiens du sanscrit a eu un effet sur le développement de la linguistique européenne. Pour apprécier à sa juste valeur cette épisode de l’histoire de la linguistique moderne, il est nécessaire de la regarder dans son contexte historique. On situait volontiers l’Inde proche de l’origine du monde, et donc sa langue, le sanscrit, à ou proche de l’origine des langues indo-européennes. L’analyse du sanscrit fournie par les grammairiens indigènes, et particulièrement par Panini, confirmait au yeux des linguistes de l’époque son caractère ancien. L’influence de Panini sur les fondateurs de la linguistique historique en Europe, notamment sur Franz Bopp, est indéniable, mais cette influence est également responsable d’une fausse appréciation par ce savant de la nature de la langue indo-européenne originale.
2) La grammaire sanscrite du point de vue indien
La grammaire de Panini a attiré beaucoup d’attention et de respect du côté de linguistes modernes à partir du vingtième siècle. Panini est souvent considéré comme un linguiste moderne avant la lettre. Du point de vue d’un indianiste et historien, cette vision n’est pas démuni de hasard, et risque de perdre de vue le contexte culturel dans lequel ce grammairien a vécu et travaillé. Quel est donc ce contexte ? Il faut se rendre compte que Panini était un brahmane vivant vers la fin de la période védique. Les textes védiques sont pleins de ce qu’on pourrait appeler des étymologies synchroniques. Celles-ci ont leur place dans une vision englobante qui couvre beaucoup plus que les seuls mots du sanscrit. C’est dans ce contexte que s’inscrit le Nirukta, un texte qui cherche à systématiser les étymologies synchroniques. Les présupposés que sous-tendent le Nirukta sont proches de ceux qui constituent la base de la pensée de Panini.
— Alessandro CHIDICHIMO (Genève/FPSE) : Recherches sur les manuscrits saussuriens avec histoire, chercheurs, exemples
Dans la recherche sur les manuscrits jouent un rôle l’histoire de la constitution des fonds d’archives, l’état des sources à disposition et l’histoire de la recherche sur ces sources. Mais la recherche sur les manuscrits me semble être aussi caractérisée par les attentes et les objectifs du chercheur face aux textes d’un auteur, Saussure dans ce cas, et les hypothèses faites à partir des connaissances à disposition et des limites d'exploration propre aux archives. La philologie saussurienne a débuté avec le travail effectué par Sechehaye et Bally pour l’établissement du texte du CLG en partant des notes des étudiants genevois des cours de linguistique générale et des certaines notes de Saussure. Ensuite, l’histoire se poursuit grâce aux travaux de Godel (1954, 1957a, 1957b, 1958, 1960) et Engler (1967/74, 1968, 1975, 1980), jusqu’aux études plus récentes. Mon propos est de présenter certains problèmes généraux des sources saussuriennes. Ensuite, je voudrais m’occuper de la textualité propre aux sources saussuriennes. Enfin, j’essaierai de montrer une possibilité de reconstruction des manuscrits de Saussure éparpillés entre plusieurs fonds.
— Roger COMTET (Toulouse) : À propos d’un recueil récent consacré à Pëtr Bogatyrëv (Serge Tchougounnikov & Céline Trautmann-Waller, éds. : Pëtr Bogatyrëv et les débuts du Cercle de Prague. Recherches ethnographiques et théâtrales, Paris 2012)
L’ethnographe russe Pëtr Bogatyrëv (1893-1971) vient de faire l’objet d’un recueil édité récemment à Paris à l’occasion d’un colloque qui lui était consacré : (Serge Tchougounnikov & Céline Trautmann-Waller, éds. : Pëtr Bogatyrëv et les débuts du Cercle de Prague. Recherches ethnographiques et théâtrales, Paris 2012) ; ce recueil a le mérite d’introduire Bogatyrëv auprès du public francophone, même si son premier ouvrage d’importance, les Actes magiques, rites et croyances en Russie subcarpathique, avait été publié en français à Paris en 1929. Après avoir présenté le contenu de cet ouvrage, nous retiendrons parmi d’autres trois problèmes apparus à sa lecture pour les examiner d’un point de vue critique ; le recueil pose d’abord une question de chronologie avec la mention « les débuts du Cercle de Prague » incluse dans le titre ; un autre problème renvoie aux principes de la textolologie, puisque c’est la première édition française des Actes magiques qui a été utilisée alors que Bogatyrëv avait supervisé de son vivant en 1971 une seconde édition en russe. Nous nous sommes enfin interrogé sur le saussurianisme supposé de Bogatyrëv qui paraît faire l’objet d’un consensus général parmi les contributeurs du recueil alors que la réception de Saussure par les Russes du Cercle de Prague fut mitigée et évolutive.
— Giuseppe COSENZA (Cosenza) : Remarques sur les études de terminologie saussurienne
La terminologie d’un savant va fixer le signifié des termes techniques qu’il a créés, renouvelés, commentés ou critiqués dans une science. Il est donc nécessaire que la réflexion d’un savant ait atteint un certaine degré d’exhaustivité. Le CLG a fixé la pensée de Saussure mais les chercheurs qui ont travaillé sur les sources manuscrites ont montré qui la pensée de Saussure est en voie d’élaboration. Le travail sur la terminologie de Saussure a été construite par Godel (1957) et par Engler (1968) ; mais Engler, dans l’introduction au Lexique de la terminologie saussurienne, met en évidence la question du rapport entre termes techniques et mots chez Saussure. Ensuite, Engler a travaillé, dans certains articles, à un index du CLG qui montre le cheminement de la pensée de Saussure (Engler, 1975 ; 1977 ; 1980 ; 1988 ; 1995).
Je voudrais montrer, à l’aide de certains exemples, que l’étude de la terminologie saussurienne qui comprend certains mots qui ne sont pas des termes techniques au sens fort peut ouvrir de nouvelle voies de recherche dans la réflexion sur le langage.
— Anita DEDIC (Lausanne) : Le purisme croate au XXème siècle vu à travers le prisme de l’ « invention » de la langue tchèque
Mon travail est une étude comparative des discours « puristes » concernant deux langues slaves, le croate et le tchèque, avec comme point de départ pour l’analyse les emprunts linguistiques. Mon intérêt pour les notions des « langues » « tchécoslovaque » et « serbo-croate » s’est manifesté lors de la lecture de l’article « L’invention de la langue tchèque et les paradoxes de l’identité » (1993) écrit par Karolina Stransky. A partir de cette lecture, j’ai compris qu’il existe de nombreux points communs dans l’histoire de la langue croate et celle tchèque. Ces informations m’ont poussée vers l’analyse d’une comparaison des courants dites puristes dans les deux « traditions», laquelle comparaison a abouti à mon mémoire de maîtrise.
Dans mon intervention, j’aimerais souligner les points les plus importants que j’ai découvert pendant mon travail.
Initialement, j’ai vu que le purisme, dans l’histoire linguistique, ne date pas de hier. Dans le cas croate, il commence à se manifester déjà à partir du XVIIème siècle. En Tchéquie, par contre, il apparait vers le XVIIIème siècle. Mais c’est au XXème siècle, particulièrement en Croatie, que le travail des puristes s’intensifie.
Par la suite, j’ai également remarqué que le purisme peut se manifester de deux façons différentes : d’un côté, il s’agit parfois de purifier une langue de toutes traces linguistiques étrangères et, d’un autre, de faire appel à des langues étrangères pour construire une langue définie[1].
En concluant, j’ai pu constater que le principe linguistique le plus important du purisme reste souvent le même : la langue est considérée comme étant composée exclusivement de mots. Le purisme encourage donc de « faire la guerre » aux substantifs, car ces derniers se transforment plus souvent en symboles. J’aimerais terminer mon intervention avec une réflexion sur ce dernier point.
[1] En Croatie, par exemple, la langue du XIXème siècle se construisit d’après le « modèle » tchèque, tandis que celle du XXème sur celui de l’allemand des nazis croates.
— Daniele GAMBARARA (Cosenza) :
1) Les manuscrits de F. de Saussure: problèmes d’édition.
F. de Saussure a laissé un grand nombre de feuillets manuscrits. Une partie comprends des véritables textes, tandis qu’une autre partie nous apparait comme des notes non organisées. En plus ce serait faux de considérer “manuscrit” comme équivalent de “inédit”: le rapport entre ces manuscrits et les travaux au moins en partie publiés ou qui ont fait l’objet d’une communication scientifique publique est plus compliqué. Les éditions les plus diffusées présentes sur le même plan les morceaux qu’elles choisissent de publier.
Je vais présenter les caractéristiques de quelques manuscrits, aussi à l’aide de photos numériques, et quelque cas de fautes dans les éditions courantes.
2) Quel héritage de Saussure est ancore vivant, à cent ans de sa mort?
Proposer aujourd’hui une théorie systématique du langage qui soit une nouvelle orthodoxie saussurienne arretée me parait impossible. Mais il y a certains points sur lesquels Saussure avait ouvert des vois de recherche, avec ses doutes fertiles, et qui méritent d’être exploré à nouveau dans le cadre de la réflexion actuelle sur le langage et le langues.
Je vais proposer comme exemples:
la notion de valeur et la notion de signifié;
la notion de système et l’activité de systématisation;
la question des différentes temporalités en jeu sur le langage.
— Eduardo GUIMARÃES (Campinas, Brésil) :
1) Evénement énonciatif et sens
L’ objectif de ce texte est considerer l’énonciation en tant qu'événement, comme Ducrot. Pour nous, l'événement est ce qui produit une différence dans son propre ordre. Cette différence est caractérisé comme produisant une temporalité. Dans cette mesure elle ne se caracterise pas, différemment de la postion de Ducrot, pour se présenter dans le temps, mais pour établir une temporalité (un présent, un passé, et un futur propre de l’événement). Dans cette mesure, si le temps, comme dit Benveniste, peut-être constitué enonciativement, il ne se caracterise pas à partir du présent du locuteur. La temporalité de l'événement est qui constitue les figures d'énonciation. Cet événement agence le sujet-parlant en Locuteur et constitue les scènes enonciatives dans lesquelle le sujet-parlant est divisé comme Locuteur, lieu social de locuteur, et lieu de dire (l’enonciteur). Les sens des énoncés sont traités comme des relations énonciatives «d’integration » de l’énoncé au texte dans lequel il est enoncé. L'analyse de la signification doit tenir compte de deux modes d`énonciation: l'articulation et la reecriture. Pour montrer ces catégories analytiques on presentera l’analyse de a) la désignation du nom « estrangeirismo» dans le travail du linguiste brésilien Said Ali et b) l’énumération dans un morceau de Quincas Borba, romain de Machado de Assis.
2) L'espace de l'énonciation et le fonctionnement des langues
L’espace d’énonciation est l’espace de distribution des langues pour les sujets parlants. L’enonciation est l'événement qui «met en fonctionnement» (je pense ici à « mise en fonctionnement » de Benveniste) les langues dans les espaces d'énonciation, où la langue fonctionne par rapport à d'autres langues et aux sujets parlants que cet espace constitue (de cette manière je m’éloigne de Benveniste). Dans cette mésure, l’énonciation n’est pas caracterisée comme dialogique, mais comme historique : toutes les figures de l’espace d’énonciation sont des sujets parlants, constitués par les relations avec les langues de cet espace. D’autre part, l’espace d’énonciation distribue de manière inégale les langues pour les sujets parlants, ce qui le caracterise comme politique.
Une autre façon d'observer l'intérêt de ce concept est analyser comment il opère dans la constitution du sens. Pour penser cet aspect on analisera le sens du nom « São Vicente - Saint-Vincent» donné au premier village établi au Brésil. Le sens de cette nomination implique, d'un côté, la relation avec le latin et, de l'autre, avec les langues indigènes du Brésil, ce qui montre qu’il faut considérer le changement des conditions des espaces d'énonciation au Moyen Âge, dans la péninsule ibérique, et au XVIe siècle dans le processus de colonisation.
— Sébastien MORET (Lausanne) : La linguistique marxiste soviétique vue de France par deux linguistes « de gauche » : Marcel Cohen et Aurélien Sauvageot
Partant de la conviction que toute science ne peut servir que la classe qui l’a engendrée, l’Union soviétique vit se développer assez rapidement après la Révolution des tentatives de créer une science typiquement marxiste. Que ce fût dans le champs des sciences exactes ou dans celui des sciences humaines, de nombreux chercheurs soviétiques s’attelèrent à distinguer – qui par une méthodologie nouvelle, qui par un objet d’étude nouveau, qui par un but nouveau – la science soviétique en germe de la science bourgeoise jugée obsolète et décadente. Dans le domaine des sciences du langage, on peut citer les « nouvelles » linguistiques, telles qu’élaborées dans les écrits, entre autres, de Nikolaj Marr (le plus célèbre), d’Evgenij Polivanov, de Rozalija Šor, de Valentin Vološinov, …
Vue du monde occidental, cette recherche de sciences marxistes attira l’attention de la communauté scientifique, marxiste ou non, comme en témoigne, par exemple, la parution en France en 1936 du double recueil A la lumière du marxisme. Dans le cadre de cet exposé, nous nous proposons d’analyser la vision que deux célèbres linguistes français « de gauche » avaient de la linguistique marxiste soviétique. D’un côté, nous lirons des textes de Marcel Cohen, sémitisant et membre du PCF, écrits dans les années 1930 et au début des années 1950 après l’intervention de Staline dans la linguistique soviétique ; de l’autre, des textes du finno-ougriste Aurélien Sauvageot qui fut un « militant socialiste actif » (Perrot, 2007 : 297). Pour chacun de ces deux auteurs, nous tenterons de répondre à plusieurs questions :
1) qu’est-ce qui distinguait, selon eux, la linguistique marxiste soviétique de la linguistique traditionnelle ?
2) comment jugeaient-ils cette nouvelle linguistique ?
3) en quoi cet intérêt pour la linguistique marxiste a-t-il influencé les propres recherches ?
— Sandra NOSSIK (Besançon) : Dialogismes, polyphonies et dissonances contemporaines
Les travaux de Mikhaïl Bakhtine et de Valentin Vološinov ont récemment fait l’objet, notamment au sein du CRECLECO, d’exégèses et de retraductions visant leur recontextualisation historique et épistémologique, et soulignant le profond décalage entre leur contexte théorique de production et celui de leur réception et appropriation par la linguistique francophone des années 1970 (cf. par exemple Sériot & Ageeva-Tylkowski 2010, Sériot 2011c, Kull & Velmezova 2011, Tylkowski 2012).
Cependant, les notions de dialogisme et de polyphonie, telles qu’elles avaient été comprises et réinvesties en France il y a plusieurs décennies, continuent de suivre leur destin singulier et d’inspirer une certaine sphère de l’Analyse du Discours : de l’hétérogénéité énonciative de J. Authier-Revuz et de la polyphonie énonciative d’O. Ducrot aux notions plus récentes de formule (A. Krieg-Planque) ou de mémoire interdiscursive (S. Moirand), des travaux des praxématiciens à ceux du courant scandinave de la ScaPoLine, nous proposerons dans cette communication une tentative de cartographie théorique de la constellation dialogique francophone contemporaine.
— Thomas ROBERT (Genève / Cosenza) : Trois théories du langage : Rousseau, Darwin, Saussure et le cas des origines
Alors que les liens entre Rousseau et Saussure sont multiples, l’ajout de Darwin comme figure de transition semble a priori moins évident. En effet, Rousseau peut, d’une part, apparaître en tant que représentant du dix-huitième siècle dont l’influence sur la théorie du signe du linguiste genevois n’est plus à prouver ; d’autre part, Rousseau, en tant que « fondateur des sciences humaines » est à la source de l’anthropologie strucurale de Lévi-Strauss dont Saussure est également une influence majeure. En revanche, rien ne semble lier Rousseau, farouchement opposé au transformisme, à Darwin, ce dernier n’entretenant qu’un lien indirect et tout à fait anecdotique avec le linguiste genevois à travers sa maigre correspondance avec Henri de Saussure.
Pourtant, en prenant le problème particulier de l’origine du langage, Darwin opère un lien important entre Rousseau et Saussure, tant d’un point de vue de l’histoire des idées que dans une perspective plus pratique, touchant à l’épistémologie de la linguistique et de l’éthologie. En effet, Rousseau est certainement le premier à avoir identifié l’articulation complexe entre société, pensée et langage à travers le refus de la question des origines de ce dernier dans le second Discours. A l’homme silencieux de l’état de nature est opposé un homme communiquant de l’état social, l’apparition du langage constituant une frontière abrupte et apparemment imperméable entre l’hypothèse, concernant l’essence de l’homme et l’histoire représentant sa réalisation. A l’extrême opposé, semble-t-il, Darwin, dans La filiation de l’homme, dépeint un animal se muant graduellement en humain, notamment à travers une complexification continue de la communication débouchant sur le langage articulé humain. Si tout semble opposer le philosophe genevois au naturaliste anglais, un lien fort peut être souligné quant à l’origine passionnelle du langage qui apparaît chez Darwin à travers l’élaboration d’une éthologie de part en part anthropomorphique. Alors que Saussure rejette tout comme Rousseau la question des origines et ne considère, dans son souci de fonder une véritable épistémologie de la linguistique, que l’homme parlant, il ne faut toutefois pas en conclure que la linguistique saussurienne est inconciliable avec l’évolutionnisme darwinien. Faire se rencontrer l’animal darwinien et l’homme saussurien dans le cadre de la question d’une origine passionnelle du langage est une proposition qui peut s’avérer fructueuse pour le développement d’une linguistique néo-saussurienne et d’une nouvelle approche de l’évolution de la communication et du langage.
— Elena SIMONATO (Lausanne) : La boîte à outils du linguiste bolchévique
«Je trouve qu'il est indécent de bien parler», disait Evgenij Bazarov, le personnage du roman Pères et fils d’Ivan Tourgenev.
Le thème du refus du «parler beau» revient à l'ordre du jour dans les discussions philologiques des années 1920 au point d'en devenir une composante essentielle. Notre communication portera sur la position exposée sur ce sujet par Arkadij Gornfel’d (1867-1941), élève d’Aleksandr Potebnja, philologue et critique littéraire.
Dans sa brochure Mots nouveaux et mots anciens, parue en 1922, il proclame haut et fort sa position «Le bolchévisme est l'ennemi du peuple russe» car la révolution a introduit dans la langue russe des nouveautés détestables. Gornfel’d explique ainsi le problème : plusieurs éléments du russe contemporain ne résultent pas de la création populaire spontanée, mais ils sont imposés « d’en haut ». Ce russe a été créée par une poignée d’intellectuels et abonde en terminologie politique importée de l’émigration, d’où l’incompréhension par un homme du peuple. La tentative d’internationaliser le russe a entraîné d’après lui une barbarisation (le peuple déforme les mots savants comme suit : konstatirovat’ – konstantirovat’ /étymologie populaire qui fait remonter le mot constater au prénom Constantin/, problema– promblema /comme si le mot problème venait de la racine prom- (industrie)).
« Je n’aurais rien contre le nom de Proletkul’t s’il lui correspondait la culture du prolétaire ; mais hélas, on y sent le culte du prolétaire », conclut Gornfel’d.
— Mladen UHLIK (Ljubljana-Lausanne) : Les chroniqueurs de la langue contre les constructeurs d'une nouvelle linguistique : réception des changements langagiers chez les pionniers de la linguistique soviétique
Vers la fin des années 1920, Afanasij Seliščev (1886-1942) offre à un linguiste turcologue son ouvrage La langue de l'époque révolutionnaire en l'enrichissant de la dédicace suivante : «A Vladimir Aleksandrovič Gordlevskij de la part d’un chroniqueur» (Alpatov, 2012, p. 65). Cette dédicace nous servira de base pour confronter deux approches de la description des changements langagiers dans la linguistique soviétique des années 1920. Nous examinerons dans un premier temps les textes des «chroniqueurs» : seront analysés les textes d'Andrée Mazon (1881-1967) et d'Afanasij Seliščev qui tentent de fournir une description détaillée de l'état de la langue russe après la Révolution d'Octobre. En dépit du fait que les deux linguistes tentent d'offrir une description objective des changements langagiers, ce descriptivisme occulte leurs présupposés théoriques et idéologiques (quels faits langagiers sont décrits, comment ils sont évalués et classifiés). Or, ni Mazon ni Seliščev ne cherchent à généraliser les résultats de leur description. C'est par le biais de cet aspect que dans un deuxième temps nous comparerons leurs approches avec celle d'Evgenij Polivanov (1891-1938) qui, influencé par Baudouin de Courtenay, se sert des descriptions des changements langagiers pour fonder une théorie générale de la langue.
— Ekaterina VELMEZOVA (Lausanne) :
1) Sur la célébration du centenaire du formalisme russe
En 2013, plusieurs événements intellectuels (colloques, journées d’étude, excursions, publications, etc.) ont eu lieu pour célébrer le centenaire du formalisme russe. Dans notre exposé, nous ferons un compte rendu des deux colloques, organisés en l’honneur de cette date à Paris et à Moscou, respectivement en avril et en août 2013. Quels étaient les domaines des recherches des intellectuels qui y ont participé? Comment ont été constitués les axes thématiques principaux de ces colloques? Pourrait-on distinguer les enjeux essentiels de ces deux événements dans la vie intellectuelle des deux capitales? Y avait-il une différence dans la répartition des centres d’intérêt des participants des colloques, d’un côté, en France, et, de l’autre, en Russie? Enfin, quels aspects du formalisme russe ont-ils provoqué le plus grand intérêt des chercheurs, et quels autres aspects, par contre, n’ont pas été analysés ni à Paris ni à Moscou? Cette analyse devrait nous permettre de discuter du «degré de viabilité» de la «méthode formelle» aujourd’hui, ainsi que de réfléchir, une fois de plus, aux atouts et aux problèmes principaux de la réception des textes philologiques du passé par la communauté intellectuelle moderne.
2) Au sujet de la publication des actes des écoles doctorales en histoire des théories linguistiques: les enjeux et les problèmes actuels de l’édition scientifique
Les actes des écoles doctorales en histoire des théories linguistiques sont publiés à Lausanne depuis 2009. Malgré les indices du succès de ces éditions (comptes rendus positifs de la part de chercheurs de différents pays, les propositions de collaboration de revues linguistiques de renommée internationale, le nombre toujours croissant aussi bien de doctorants et de jeunes docteurs que de chercheurs expérimentés qui désirent publier leurs travaux dans nos volumes), quelques problèmes d’édition se posent. Ils concernent aussi bien la forme que le contenu des contributions, tout en semblant refléter non pas la situation particulière avec la publication de nos recueils, mais plutôt l’état des choses dans l’édition scientifique d’aujourd’hui en général. En présentant aussi bien les avantages que les problèmes principaux de l’édition de nos recueils doctoraux, nous donnerons en même temps quelques instructions pour la publication de notre prochain volume.